À l’exception d’un seul de ses membres / dit Dion. [8 décembre 2020]

« La Presse de Gauche, la Presse de Mi-Gauche et la Presse
Réactionnaire clament leur approbation : Il importe au premier
chef de détruire le mythe  de l’expérience vécue sur d’autres
plans.” Et assènent de dures et sombres vérités… parlent de
prophylaxie… de fièvre aphteuse… Les trusts du monde s’évertuent
frénétiquement à couper les lignes de contact… La Planète
erre à l’aveuglette  vers un destin de fourmilière… »

 William Burroughs, Le Festin nu, 1959, trad. Eric Kahane

 

Chères amies, chers amis,

Comme si nous allions nous laisser « empêcher » par si peu… !

Avant la sortie du livre inconnu d’Yves De-Mervent au mois de janvier, en préparation, Pontcerq poursuit, et lentement commence à se hâter, en compagnie de ses amies et amis, de ses camarades, de ses soutiens, de ses proches.

1) Ici, Lionel Monier, récitateur-rezitator, lit deux historiettes de Hebel absolument inédites en français, et qui ne seront dans les semaines et mois à venir nulle part imprimées ([46] et [47] du Hebel-Kolportage). Même les exemplaires de travail, feuilles ayant servi à la tâche de traduction et utilisées à l’enregistrement par le rezitator pour lire, ont été rigoureusement et aussitôt détruites. https://kolportagehebel.wixsite.com/hebel [avec pipistrelle de Lénon]

2) Sénèque, à partir du mot « apothéose » dit Dion, fit le mot « apocoloquintose ». On ne transformait plus Claude Empereur en dieu (par apo-théos-e) mais en citrouille, courge, coloquinte (par apo-coloquint-ose). Eh bien, si l’on panthéonise (ceux-là ou un autre), on pourrait à ce compte tout de même pancoloquintoniser. Voilà toute notre opinion sur l’affaire (et nous la partageons !).

      L’affichage messalino-claudien (tête de Claude Empereur, tête de Messaline) se poursuit dans Rennes avec des phrases d’Alfred Jarry (lycéen rennais), auteur d’une Messaline, et, à partir de décembre, avec des extraits de Jacques Rancière (philosophe finistérien) concernant l’art qui souvent se veut (beaucoup, très) politique : pour la série nouvelle, voir [ici]. Nous piochons dans Le Spectateur émancipé (publié à La Fabrique). Il s’agit d’interroger le rapport entre image et image, et entre image et réalité.

       Ainsi l’affichage messalino-claudien, régulièrement renouvelé dans la ville, informera nos lectrices et lecteurs (en particulier celles et ceux qui en ces temps troublés par les fermetures, limitations, gestes barrières, obstructions, n’ont plus accès à internet) de quelques-unes de nos intentions présentes et à venir, dans la rue. Voilà Claude Empereur et Valérie Messale sortis des librairies : et cela pas pour répéter qu’il faudrait (enfin !) opposer action réelle à pensée pure ; puisqu’au contraire Claude fictif et Messaline fictive ne feront jamais (pour l’instant) que de nous et vous raconter des histoires, de très fictives même…


3) Ainsi nous collons d’un côté ; et arrachons de l’autre.
La longue campagne d’arrachage des petites vignettes « Livres acquis grâce aux moyens alloués par la fondation Siemens (Carl Friedrich von) », à la bibliothèque de l’Université-Humboldt à Berlin, se poursuit activement malgré la fermeture partielle et les éléments-barrières. Il suffit de travailler de façon très régulière et un peu ordonnée. (Nous travaillons par cote.)


* Dans ces années années 1990, la fondation Carl Friedrich von Siemens commençait son mécénat d’achat de livres par milliers pour les bibliothèques de l’Université Humboldt ; puis finançait des chaires dans cette université. Dans ces mêmes années, Siemens refusait toujours des compensations financières à d’anciens employés de ses usines : par exemple à Waltraud B., qui avait pourtant travaillé pour cette entreprise pendant la Seconde Guerre mondiale, depuis le camp de Ravensbrück : on ne lui reconnaissait pas ces mois de travail pour la comptabilisation de sa retraite ; en effet il ne s’était pas agi d’un travail à proprement parler salarié (Lohnarbeit). Waltraud B. porta sa plainte contre Siemens devant un tribunal de Wuppertal ; les avocats de Siemens furent meilleurs que le sien (ce qu’on lit dans : Zwangsarbeit für Siemens in Auschwitz und Berlin [Travail forcé pour Siemens à Auschwitz et à Berlin], édité par „Zwangsarbeit erinnern e.V.“, Berlin, Metropol Verlag, 2006, p. 95). Carl Friedrich Siemens, le fils, a fondé sa fondation de mécénat de la culture et des arts après-guerre (avec des sommes d’argent considérables, qui venaient du père ; ou de qui ?).

4) Nos livres, depuis longtemps, ne sont pas vendus sur Amazon. Voir la déclaration de notre diffuseur, Hobo – qui clarifie : « Nous ne vendrons plus nos livres sur Amazon. Son monde est à l’opposé de celui que nous défendons. Nous ne voulons pas voir les villes se vider pour devenir des cités-dortoirs hyperconnectées. Amazon est le fer de lance du saccage des rapports humains et de l’artificialisation de la vie. Nous devons, sans attendre, boycotter et saboter son monopole… » Voir la suite [ici].

5) Quelques échos concernant nos parutions du printemps dernier, au temps des librairies closes :
a) Sur Ni de Dominique Meens : voir sur remue.net, [ici]. « – Tu ne pourrais pas nier cela, [dit la Reine Rouge], même si tu essayais avec tes deux mains.  Je ne nie pas les choses avec mes mains, objecta Alice.  Je n’ai jamais prétendu cela, répliqua la Reine Rouge. J’ai dit que tu ne pourrais pas le faire, même si tu essayais. » (Lewis Carroll, Alice de l’autre côté du miroir)
b) Sur Quelques remarques concernant Bach (martelées)  à partir de motifs pris à sa vie de Frédéric Metz : voir sur Médiapart, [ici].

6) Après le livre inconnu d’Yves De-Mervent, en janvier, sortira au printemps le livre de Laurent Quinton :
Deux fils.  Pinocchio/Frankenstein (1940, 1931).

7) Nous aurions sans doute attendu janvier pour vous écrire et vous faire part de nos petites nouvelles, s’il ne nous avait pas semblé urgent de participer à la diffusion d’une information, étrangement peu relayée, même par certains des opposants à la loi « sécurité globale » (focalisés sur d’autres points, dont nous ne contestons nullement l’importance). Nous reproduisons ce que Joana Desplat-Roger, enseignante à Rennes 2, nous adressait, à nous et à d’autres (ses amis et collègues, ses étudiantes et étudiants), fin novembre. Nous n’avons d’abord pas réagi en pensant qu’une telle disposition de mise au pas serait vite relayée un peu partout. Il semble que ça n’ait pas été le cas. (Il suffit d’imaginer ce que deviendraient les universités si, etc.). Joana Desplat-Roger écrit :
      « […] le Sénat a rajouté dans la loi LPR (Loi de Programmation de la Recherche), définitivement adoptée le 20 novembre 2020, un amendement pénalisant le trouble à la tranquillité et l’atteinte au bon ordre des établissements – ce qui revient à dire, tout simplement, qu’un étudiant et/ou un professeur d’université pourra encourir jusqu’à trois ans de prison et 45 000 euros d’amende pour une tentative de blocage de l’université, pour avoir siégé dans une AG non autorisée, en clair : pour toute forme de militantisme sur le campus. Cet ajout, dont on voit mal ce qu’il vient faire dans une loi censée définir le plan de financement de la recherche pour les années à venir, a été introduit sans aucun débat parlementaire par une « commission mixte paritaire » (rassemblant quelques membres du Sénat et de l’Assemblée Nationale) le 9 novembre 2020, soit quelques jours à peine après l’annonce d’un nouveau confinement et la fermeture des universités. La Ministre de l’Enseignement Supérieur espère calmer les esprits en affirmant que cette pénalisation ne concernera que les personnes extérieures à l’établissement, mais ce n’est pas vrai ! Comme le montre très bien cette analyse (https://academia.hypotheses.org/28160), ceux et celles qui sont concerné.e.s par cet article de loi sont les personnes dites non-autorisées. Or, n’importe quelle personne de la communauté universitaire peut être administrativement considérée comme non-autorisée à participer à une activité scientifique lorsque cette dernière requiert une inscription préalable, et plus encore si elle se rassemble lors d’une AG qui n’est pas expressément autorisée par la présidence de l’université. »

8)  Sur les conseils répétés des journaux, nous avons nous aussi fini par relire La Peste, en ces sombres temps. « Tout virus procède de cellules détériorées menant une existence parasitaire : il éprouve une affinité spécifique avec la Cellule Mère, et c’est ainsi que les cellules hépatiques délabrées se dirigent vers le berceau de l’hépatite et autres maux. Il en résulte que chaque espèce a son Maître Virus : l’image pervertie de l’espèce elle-même. L’image pervertie de l’Homme évolue de minute en minute, de cellule en cellule… la misère, la haine, la guerre, les gendarmes et voleurs, la bureaucratie, la folie, tous les symptômes du Virus Humain. » (p. 244) / « ce qui ne se produit qu’exceptionnellement car les journalistes n’assistent aux procès de l’Ancien Palais qu’en cas de disette absolue de nouvelles. »  (p. 246) / « Or on peut à présent isoler et soigner le Virus Humain… » (p. 244) / « Délit de violation de l’article 134 de la Loi d’Hygiène et de Santé Publique… a provoqué un orgasme par des méthodes frauduleuses… » (p. 322) / « Suskif est ce jeune et brillant romancier qui vit dans une pissotière modernisée dans la rue des putains du Quartier Nègre. » (p. 259) / « Il apparaît d’emblée que le Parti Liquéfactionniste est, à l’exception d’un seul de ses membres, composé exclusivement de dupes, à ceci près qu’il faudra attendre le jour de l’absorption finale pour savoir qui aura été dupe de qui… » (p. 234)
 

*

Donc à très bientôt (par la voie d’internet ou celle des images messalino-claudiennes, urbi dans la rue).

Plébifugue – Citrouillage et/ou liquéfaction du prince !

– Et ne riez jamais dans vos coudes…)

Finis coronat opus

Pontcerq

Rennes, le 8 décembre 2020